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Evolution de la prise en charge des personnes sourdes - 2 ème Partie

De 1945 à nos jours
Article publié le lundi 2 avril 2007.


Intervention faite par Henri-Jacques Stiker lors du 15 eme anniversaire de l’URAPEDA BRETAGNE.

Pour faciliter la lecture l’intervention est publiée en 2 articles

  1. De l’Abbe De l’Epee au milieu du XXème siècle
  2. De 1945 à nos jours

Evolution de la prise en charge des personnes sourdes

Seconde Partie - De 1945 à nos jours

Sommaire

Première Partie - De l’Abbe De l’Epee au milieu du XXème siècle

-  Introduction
-  De l’Abbe De l’Epee au milieu du XXème siècle
-  Le 19e siècle
-  Analye globale du débat
-  Argument sur les bienfaits ou les méfaits de l’instruction dans le cadre des écoles existantes.
-  Arguments idéologiques et anthropologiques.
-  Notes de la 1ère partie

Seconde Partie - De 1945 à nos jours

-  De l’inadaptation au handicap
-  La tendance culturaliste.
-  Notes de la 2ème partie

De l’inadaptation au handicap

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Les jeunes sourds vont être englobés dans la création du secteur de l’enfance inadaptée, dont les prémisses sont posées avant la guerre mais qui trouvera, paradoxalement mais aussi logiquement sa maturation sous le régime de Vichy et qui perdurera pendant environ deux décennies après la guerre.

Sous la plume des plus grands noms de la psychologie et de la pédagogie française de l’époque, on lit : « Est inadapté un enfant, un adolescent ou plus généralement un jeune de moins de vingt et un ans que l’insuffisance de ses aptitudes ou les défauts de son caractère mettent en conflit prolongé avec la réalité et les exigences de l’entourage conformes à l’âge et au milieu social du jeune » [1]. La déficience et l’infirmité sont vues comme des inadaptations à la société, dont les normes semblent être intangibles. La pratique qui s’ensuit est une pratique "rééducative", qui demande au sujet un effort pour rejoindre les normes établies (école, famille, et, en prolongeant, entreprise).

Michel Chauvière [2] a très bien modélisé cette première tranche de politiques sociales, après 1945.

L’idée d’inadaptation va donner lieu au surgissement de nombreuses institutions spécialisées, sur l’idée précise de rééducation, c’est-à-dire que l’ancienne éducation se double de la volonté de redonner une adéquation entre l’enfant et le milieu social. Les familles entrent en jeux avec force, d’autant que les institutions dont j’ai parlé jusqu’ici n’accueillaient finalement que peu de monde et que les familles pouvaient désormais bénéficier, par la couverture sociale, de prises en charge inexistantes auparavant. Les parents vont se grouper en associations et gérer par-là des institutions correspondantes à leur attente. Le secteur médico-social prend de l’extension. Citons ici la rédaction des fameuses "annexes 24"., annexes à un décret de mars 1956, lequel donne existence aux IME, IMPRO etc. et qui seront rénovées et élargies par les décrets d’avril 1988 et octobre 1989.

Dans la notion d’inadaptation sont compris aussi bien les enfants "caractériels", que ceux qui ont des troubles proprement psychiques, que les enfants paralysés que les enfants sourds, ou aveugles.

En revanche, en 1967 dans un rapport [3] marquant, François Bloch-Lainé détache, dans le grand tout de l’inadaptation, le handicap proprement dit dont l’originalité tient dans la liaison entre un point de vue sanitaire (sous la forme de l’infirmité) à des difficultés particulières eu égard à une moyenne ; à quoi il ajoute que « l’inadaptation peut-être due, tout autant, à l’état de la société, qu’à celui de l’individu et c’est alors le milieu qui est inadapté aux personnes » (p.2). On sortait du fameux champ de « l’enfance inadaptée » et du concept d’inadaptation des années trente et surtout quarante. La notion englobante d’inadaptation s’est vue progressivement écartée au profit de handicap, même si la population handicapée est plus restreinte que celle qui pouvait être mise sous le terme inadapté. Il faut noter que F. Bloch-Lainé faisait se rencontrer deux secteurs qui avaient suivi leur chemin de façon séparée : celui de l’enfance (de la "déviance") et celui des adultes (de l’invalidité). La carrière du mot et de la notion d’inadaptation n’a pas cessé pour autant et s’est progressivement défaite de connotations idéologiques trop précises [4]. Cependant, de fait, après des débats pleins d’hésitation et d’indécision terminologique, entre 1968 et 1975, où l’on balançait entre placer le problème des déficiences dans le grand tout du « handicap social » (expression retenue dans une loi de novembre 1974, passée dans le code du travail) ou de l’exclusion (mise à la mode par le livre de René Lenoir [5], mais déjà employée par Pierre Massé et Joseph Wrésinski [6]), on a tout de même choisi d’établir une loi spécifique, créant des obligations et des droits particuliers, pour des personnes éprouvant des difficultés d’intégration sociale repérables, et mesurables par des barèmes (lesquels ont été progressivement mis en place) à cause de problèmes de déficits physiques, sensoriels, intellectuels, psychiques, installés dans la durée, voire définitifs. Tout réside dans le lien entre une déficience avérée et une infériorisation sociale. Et l’on peut considérer que le mouvement de clarification, à l’œuvre aussi bien dans la loi de 57, que dans les tâtonnements des années 60, que dans les mises au point des années 70, trouve son expression la meilleure dans un document, d’origine anglaise (Philippe Wood) assumé par l’Office Mondial de la Santé en 1980, principalement diffusé et rendu opérationnel en France où il a été publié sous le titre : « Classification internationale des handicaps : déficiences, incapacités, désavantages. Un manuel de classification des conséquences des maladies » [7]. La distinction consiste à fractionner certaines conséquences des maladies en trois notions. Celle de déficience : qui définit l’atteinte, le discours médical, l’intervention des hospitaliers ; celle d’incapacité qui porte encore sur l’individu mais au point de vue des limitations de ce qu’il peut accomplir, et circonscrit un lot d’interventions paramédicales et éducatives ; celle de désavantage social ou handicap proprement dit : qui tente de mettre l’accent sur la situation et donc de relativiser les conséquences.

A cette mise en place de la loi dite d’orientation en faveur des personnes handicapées de 1975, un tout autre courant, venu surtout de l’Amérique du Nord, allait poser le problème autrement, et ce par la réflexion et la revendication des adultes sourds. Il ne s’agit plus ici de s’inscrire dans une problématique du handicap, telle qu’on l’entendait en France, fut-ce avec les distinctions introduites par Wood, mais de poser le problème en terme de minorité opprimée.

La tendance culturaliste.

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En effet, aux Etats Unis, autour du mouvement de “ Independant Living ”, de la revue et du réseau “ Disability studies ” animé jusqu’à sa mort par Irving Zola (connu par ailleurs pour ses études sur la douleur) l’analyse culturelle a joué à deux niveaux : les représentations du handicap peuvent dépendre de facteurs liés à des données religieuses, langagières et traditionnelles ; par ailleurs les personnes handicapées se constituent en groupes culturels avec leurs traits singuliers, à partir de conditions de vie, d’une histoire etc. De même que le mouvement des femmes a engendré les “ women studies ”, sur la base d’une revendication de “ culture féminine ”, seule complètement compréhensible par les femmes elles-mêmes, de même en va-t-il des personnes handicapées. Le cas qui donne sans doute le plus de poids à la position privilégiée outre Atlantique, est celui des sourds. J’entends ici les personnes nées sourdes, ou du moins celles qui sont obligées de pratiquer la langue des signes, quand bien même elles seraient bilingues et utilisent divers média langagiers, si elles veulent s’exprimer vraiment. Cette communauté qui s’est vue interdire sa langue pendant un siècle [8] peut assez légitimement revendiquer le statut de communauté culturelle minoritaire.

L’argument consiste à dire : nous sommes des parlants comme les autres parlants ; nous avons une langue ; certes une langue de signes corporels et non de sons, mais une langue à part entière. Nous avons aussi, par là-même, une façon de penser, de nous situer, bref une façon d’être-au-monde. Notre “ infériorité ” nous rapproche de celle des communautés culturelles minorées, parce que minoritaires ou parce que trop étrangères dans une culture dominante et dominatrice. A partir de là on voit bien comment la notion de handicap, et encore plus celle de déficience, s’éloigne, ou devient un trait secondaire, voire est rejetée complètement.

Au premier élément culturel certains ajoutent celui du caractère naturel de la surdité. Les sourds sont sourds comme certains sont noirs ou de la même manière que l’on est homme ou femme. Vouloir transformer cette condition est aussi absurde que de vouloir rendre un noir blanc ou une femme homme ! [9].

Cette condition implique un mode de communication et de signification propre. Arracher un enfant sourd de sa communauté naturelle constitue une violation inadmissible. Dans un article inédit, Harlan Lane écrit : “ Même si des enfants destinés à faire partie des communautés afro-américaine, hispano-américaine, indienne, ou sourde, pouvaient être transformés par le bio-pouvoir en mâles caucasiens blancs entendants, même si la société pouvait faire cela, elle ne le devrait pas ”. Le possible n’est pas le souhaitable. On ne doit pas davantage demander à un sourd de parler oralement comme les entendants. La surdité n’est pas une limite, c’est une caractéristique biologique qui a donné lieu au développement d’une culture particulière.

Les caractéristiques de la communauté des sourds se prêtaient fort bien à l’interprétation culturaliste américaine concernant les Noirs, les Femmes ou les Mexicains. Il ne faut pas oublier qu’aux USA existe une université pour sourds - Gallaudet à Washington -. Ce qui est le symbole d’une culture sourde. Pour n’être pas le cas en France, la conscience de constituer une communauté culturelle n’est pas absente chez les sourds français.

Les questions sont de plusieurs ordres. Il serait à craindre que la revendication d’une telle spécificité finisse par faire de la communauté sourde une sorte d’exception, à la manière des indiens d’Amérique, ou du Canada, habitant leur “ réserve ”, tenus dans un écart d’indifférence et de condescendance. Il serait à craindre, empiriquement, que certains ne se privent pas de généraliser l’idée à tous les handicapés : bien à part dans leur réserve ou du moins dans leur statut. Ne serait-ce pas rejoindre, pour la conforter, l’idée qui se répand de traiter certaines catégories dans une sorte d’externalisation de l’espace social commun ? L’idée de communauté cristallisée ne porte-t-elle pas en germe la “ réalisation ” d’un dehors de la société normée, qui deviendra vite un dehors de la société tout court ?

Il faut questionner plus à fond le lien qui est établi entre une caractéristique biologique et l’affirmation d’une culture. Y a-t-il une culture féminine, ou masculine ? Y-a-t-il une culture noire ? Pourquoi pas une culture naine ? La culture n’est-elle pas le fait historique d’un groupe, d’une société humaine, qui a développé une langue, un art, une religion, un type de rapports entre les hommes et les femmes etc. On peut admettre qu’historiquement les sourds ont créé leur culture, comme les Bantous, les Basques ou les Français. Mais cela ne tient pas à une donnée naturelle, biologique. C’est une histoire. Et même si l’on admet une "négritude" (Léopold Senghor) par exemple, elle est encore de cet ordre historique. Chez les puristes de la Surdité, il me semble y avoir une confusion. Tous les sourds qui se réclament de leur langue et de leur culture ne sont pas Harlan Lane. Raison de plus pour préciser les distinctions.

Qu’est-ce qu’une culture, aujourd’hui, qui ne se voudrait pas traversée par d’autres ? Défendre le français n’est pas synonyme du refus de parler les langues étrangères. Certes les plus rigoristes des sourds acceptent le bilinguisme, mais il existe une crispation, compréhensible historiquement parlant, qui conduit à une impasse. Ajoutons qu’une personne donnée, appartenant à une culture donnée, peut très légitimement s’immerger dans une autre culture et la faire sienne. Le respect, le développement et la propagation de la langue et de la culture sourdes n’impliquent pas un “ indiénisme ” infécond.

Faut-il refuser de considérer les sourds comme des handicapés et plus précisément comme des déficients ? Une réponse pragmatique ne serait pas suffisante qui consisterait à dire que le statut de handicapé comporte certains avantages que, dans la société instable où nous nous trouvons, il est prudent de conserver. De fait, les lois et les institutions pour handicapés sont ouverts aux sourds, et ceux-ci y font appel.

On peut dire de toute “ infirmité ” ce que les sourds disent d’eux-mêmes : nous sommes nés ou devenus comme cela, cela est bien dans le grand concert des différences et des singularités. Il est vrai que c’est toujours en référence à une norme, qu’elle soit modèle idéal ou établissement d’une moyenne, que nous jugeons tout écart. La surdité rappelle de façon éminente l’arbitraire de nos références mentales ou sociales. Par là, mais pas sans tous les autres qui présentent des caractéristiques moins communes que la majorité, la surdité pose avec intensité le débat démocratique. Il s’agit donc moins de savoir s’il faut classer les sourds, et les autres, ici ou là, que de savoir comment on peut établir une société sur la prise en compte radicale des particularismes. En ce sens la surdité constitue un aiguillon pour la construction démocratique, mais le débat se gâte si des fanatismes se mettent en route. On le voit parfois, et l’histoire des implants cochléaires en est une illustration car d’un côté une recherche légitime se transformait chez certains en machine de guerre contre la langue des signes tandis que d’un autre côté une revendication légitime d’identité devenait un refus de toute investigation pour aider l’audition.

Pour l’instant il est évident que la prise en charge de la surdité que la législation prévoit reste dans le cadre de la couverture sociale et de la loi de 1975. Mais comme vous le savez celle-ci, après celle sur les institutions sociales et médico-sociales actuellement en navette entre le Sénat et l’Assemblée nationale, commence à être à nouveau débattue. Que la communauté sourde, et que les personnes devenues sourdes (dont je n’ai pas parlé explicitement), disent haut et fort, mais de façon démocratique, la place et les prises en considération qu’elles désirent. Le débat commence au sein même des vos institutions et associations. Je sais qu’il est vif, voir tellement viscéral, qu’il n’est pas facile à établir, mais il est indispensable.

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Notes de la 2ème partie

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[1] voir : Dr Lagache, avec le concours de M M Dechaume, Girard, Guillemain, Heuyer, Launay, Male, Préaut, Wallon. Nomenclature et classification de jeunes inadaptés, paru dans Sauvegarde, nー 2, 3, 4, 1946. Laquelle nomenclature comprend les malades (physiques et psychiques), les déficients (physiques, sensoriels ou intellectuels), les caractériels (caractère, moralité, comportement). Cette nomenclature figure en annexe du livre de Michel Chauvière, Enfance inadaptée : l’héritage de Vichy, Paris, Editions ouvrières, 1980. On a même montré que cette conception relevait directement de l’idéologie vichyssoise qui, en ce domaine, fut tristement représentée par Alexis Carrel : Christian Rossignol, Quelques éléments pour l’histoire du conseil technique de l’enfance déficiente et en danger moral -1943- Approche sociolinguistique et historique, Le temps de l’histoire, nー1, 1998. On peut se reporter à de multiples publications des Cahiers de Beaumont. Voir aussi R.Perron Les enfants inadaptés, PUF, Paris, QSJ, 1972. Une discussion intéressante de Christine Philip, La notion de troubles du comportement et ses avatars, dans Handicap et inadaptation. Fragments pour une histoire : notions et acteurs, ALTER, 1996.

[2] Voir le livre cité dans la note précédente. Mais surtout pour les schémas des politiques sociales : Michel Chauvière, L’insertion et ses déclinaisons. Retour sur quelques référentiels des politiques publiques contemporaines dans L’insertion professionnelle des personnes handicapées en France (sous la direction de Alain Blanc et Henri-Jaques Stiker), Paris, Desclée de Brouwer, 1997

[3] Etude du problème général de l’inadaptation des personnes handicapées, Rapport présenté au Premier Ministre par François Bloch-Lainé, inspecteur général des finances, décembre 1967.

[4] On peut se reporter à de multiples publications des Cahiers de Beaumont. Voir aussi R.Perron Les enfants inadaptés, PUF, Paris, QSJ, 1972. Une discussion intéressante de Christine Philip, La notion de troubles du comportement et ses avatars, dans Handicap et inadaptation. Fragments pour une histoire : notions et acteurs, ALTER, 1996

[5] René Lenoir, Les exclus, un français sur dix, Paris, Seuil, 1974. Réédition en 1989. Le livre, dont le titre est du autant à l’éditeur qu’à l’auteur, a été vilipendé de différents côtés : mettant dans un grand tout les désavantages et inégalités les plus divers, R.Lenoir s’était attiré les foudres d’une analyste comme Jeanine Verdès-Leroux ; par ailleurs certains libéraux n’avaient pas apprécié que René Lenoir fustige les mécanismes économiques centraux producteurs de cette exclusion (et qui l’amenait à écrire des phrases comme celle-ci : ォ aucune famille, aussi bourgeoise soit-elle et quelles que soient ses traditions religieuses ou laïques, ne peut se vanter qu’un de ses enfants ne sera pas un fugueur, un drogué, un jeune délinquant ou un révolté. La gangrène menace donc le corps social tout entier サ p.55 de l’édition de 1989). Il est certain que les "personnes handicapées" de la loi de 1975, loi rédigée et défendue pour une grande part par Lenoir lui-même, ont eu tendance à être, dans les années 80 et 90 assimilées aux exclus. On voit le lot de confusions successives et possibles.

[6] Sous la direction de Serge Paugam, L’exclusion, l’état des savoirs, Paris, La Découverte, 1996, p.9.

[7] Publié par l’INSERM et le CTNERHI (Centre technique national d’études et de recherches sur les handicaps et les inadaptations). Il faut souligner que le titre anglais officiel est : International classification of impairments, disabilities and handicaps. A manual of classification relating to the consequences of disease. Ce qui souligne une volonté de ne plus prendre le mot handicap comme générique et de distinguer plusieurs aspects, qui sont autant de plans d’expérience et d’interventions professionnelles, le tout pour relativiser les difficultés des personnes, dont l’appréciation ne doit pas être rivée à la seule vue du diagnostic, et du pronostic, médical. Ce document, qui a fait couler énormément d’encre, tente d’être remplacé par une nouvelle classification, très éloignée de la précédente dans sa perspective de base. Cette proposition vient seulement de voir le jour, et nous n’avons pas ici le loisir d’en donner un aperçu.

[8] Entre l’Abbé de l’Epée, mort en 1789, organisateur de la langue signée, et le tristement célèbre congrès de Milan (réunion des institutions d’enseignement pour sourds, 1880) les sourds avaient développé une “ culture sourde ” (avec force rassemblements, rencontres, banquets, accès au savoir etc.). Avec l’interdiction de se servir de la langue des signes dans l’enseignement, prononcée dans cette enceinte du congrès, une minorité linguistique allait se trouver opprimée, le mot est ici valable, dans son expression. Or, même si elle ne suffit pas à définir une culture, une langue en est l’élément majeur puisque c’est une sémantique avec ses découpages propres, une façon de concevoir et de symboliser. En ce qui concerne l’histoire des sourds et de la langue, je renvoie aux ouvrages suivants. Harlan Lane, Quand l’esprit entend, histoire des sourds et muets, Paris, Odile Jacob, 1991 ; Jean-René Presneau, Aude de Saint Loup, Bernard Mottez ont, par le biais du vocabulaire, donné des contributions importantes dans Handicap et inadaptation. Fragments pour une histoire. Notions et acteurs, Paris, ALTER, 1996.

[9] Le contre exemple est fourni par un courant eugéniste qui, par peur de voir se développer une "race sourde", proposait d’interdire le mariage entre sourds et exigeait la stérilisation. Bell, A.G. Memoir upon the formation of a deaf variety of the human race. New Haven, National Academy of sciences, 1883.


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